Suite à une l’ouverture de « dompteurs de cairns » l’an passé avec Alexandre Pierre, aventure particulièrement rigolote, j’ai parcouru le Cap Canaille dans tous les sens à la recherche d’une nouvelle « première ascension » à tenter. Parmi plusieurs idées, je sélectionne une jolie cheminée (jolie de loin) et qui semble assez abordable (ceci toujours d’assez loin…). Je parcours même le début de la première longueur un dimanche, pour m’assurer de la qualité du rocher, décrit comme « délabré » et « bringue-branlant ». Il n’est certes pas excellent, mais cela devrait suffire pour ouvrir un joli petit itinéraire en escalade traditionnelle !
Le lendemain, je reviens avec mon ami Ivan Dufresne, collègue moniteur d’escalade, qui n’est certes pas encore un grimpeur dans le 8a à vue mais qui s’est formé en Écosse et pour qui l’escalade sur coinceur reste logique. Ça devrait donc aller ! Je lui propose d’aller ouvrir la première longueur, dont j’avais regardé hier le début et qui me semblait adaptée à une découverte de ces parois tourmentées. Celui qui découvrit Canaille la semaine passée dans la voie « la théorie des dominos » part donc pour sa seconde voie Soubeyranne, coinceurs au baudrier. Prudemment, il remonte cette belle cheminée qu’il libère au passage de nombreux blocs coincés, pour en sortir par un pas de 5b mal protégé et plutôt aérien. Après une courte traversée à gauche, il officialise la première longueur en posant son relais sur un arbre.
Après l’avoir rejoint, je repars en tête pour la seconde longueur. Pour atteindre la cheminée repérée du bas, je contourne un bref ressaut par la gauche puis monte dans la cheminée parallèle en me disant que je récupérerai le tracé désiré plus tard. Quelques peu contraint par le terrain, je dois poursuivre droit dans mon tracé trop à gauche. L’escalade n’est certes pas bien difficile (5a) mais le rocher est sur la fin vraiment inquiétant. Heureusement, de très bonnes protections me permettent de continuer sans danger en rejoignant une belle vire sur laquelle je fais relais (un piton moyen laissé, ensemble difficile à construire). D’ici, impossible de rejoindre ma cheminée à droite, et redescendre en rappels semble carrément dangereux tant les vires sont encombrées. Pas encore arrivés à mi paroi, le sérieux de la fuite en avant et du non retour se font sentir.
Je repars ensuite en tête pour la troisième longueur, un dièdre au rocher douteux au début qui se ferme par un toit. Une courte traversée à droite me mène à un ressaut en bon rocher et bien protégeable. Enfin une belle escalade (6b, court) permet de se placer et de grimper correctement rassure sur l’intérêt de notre présence dans cette paroi, c’était ce que nous étions venus chercher à la base… Un bon relais sur vire (un piton laissé) permet de mieux se détendre…
Quatrième longueur, qui démarre de manière rigolote par un ramping sur une strate qu’il aura fallu abondamment nettoyer pour la traverser, puis un joli dièdre, bien fissuré et protégeable. Un court ressaut à droite me pose sur une vire ou je construis le dernier relais de la paroi, sur trois pitons (toujours en place). Nous sommes alors à une quinzaine de mètres du sommet, mais la paroi se finit par une barrière de toits à l’équilibre définitivement incertain. Après une longue observation, je trouve un chemin qui pourrait me permettre de sortir de ce dédale peu rassurant.
Cinquième longueur. Je pars du relais et arrive rapidement à me protéger : jusque là, tout va bien. Pour passer le surplomb final, mon itinéraire doit emprunter sur deux mètres une fine strate formant une vire. Après l’avoir purgée, il n’en reste plus grand chose, et je m’aperçois qu’elle sonne franchement creux… Après une bonne réflexion, je constate que Ivan mon assureur n’est pas dans l’axe de ladite strate, et qu’en cas son effondrement serait plus impressionnant que dangereux car étant au dessus, je ne pouvais plus cogner la strate en cas de chute de cette dernière,puisqu’elle ne serait plus là. Les protections me semblant particulièrement fiables, j’y vais. De là, un dernier crux en rocher correct parfaitement protégé (6b à bacs) me permet de prendre pied sur une mini vire puis, trois mètres plus haut, le sommet de la paroi. Ouf, nous sommes sortis !
Accès : Rejoindre le couloir de départ de « tord boyau » mais ne pas longer la vire à droite. Partir droit dans la cheminée : une lunule.
Les cotations :
L1 : 5b;
L2 : 5a;
L3 : 6b;
L4 : 5b;
L5 : 6b.
1ière ascension : Ivan Dufresne et Nicolas Gay, le 03 juin 2019
Difficulté : TD; 6b max, 6b obligatoire; III; 110 mètres. Voie déconseillée en raison de la qualité du rocher dans les sections faciles
Matériel : Deux jeux de friends du 0.2 au 4, câblés, sangles, pitons variés
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