Comme son nom le laisse supposer, la voie de la Compagnie a été ouverte en plusieurs fois par des équipes différentes. La première étape fut bien sûr les quelques mètres médians, traversant au dessus du fjord, de la sans retour. L’itinéraire a d’ailleurs à cet endroit été détourné, on passe désormais les pieds là où auparavant nos mains glissaient. Ensuite, le bas fut ouvert par François Guillot et Serge Marchard en 1963 également. Enfin, il faudra attendre 1969 pour que la voie soit enfin achevée, par les très célèbres également Serge Gousseault et Jacques Kelle. Aujourd’hui, seul le haut est resté équipé, et pour plus d’homogénéité certains démarrent par la première longueur de « princesse caramel », qui ne comporte qu’un point.

Mais aimant faire les voies intégralement et n’ayant jamais gravi « les dents de la mer », je pars aujourd’hui dans l’itinéraire initial et intégral. La première longueur est agréable, sur un beau rocher blanc bien prisu. La seconde l’est également, mais l’on sent que l’on retrouve la sans retour, rien qu’à la patine… La troisième longueur est par contre un peu détournée, mais les prises semblent trop grasses… L’ambiance reste en revanche incroyable dans cette traversée !

Ensuite, on rejoint ce qu’il reste de la voie de la Compagnie. Une fissure cheminée large, chipseuse, raide. La première longueur met dans le bain, et serait majeure sans quelques mètres en rocher dangereux aux deux tiers… Dommage, mais c’est l’aventure ! Et enfin, la fameuse fissure… Comme la longueur précédente, elle fut auparavant cotée V+, mais c’était une autre époque. Un temps où les salles d’escalade ne bradaient pas les cotations pour flatter les clients. Un temps où le VI était dur. Vraiment dur. Une époque où escalade rimait souvent avec engagement…

Ce passage est à la hauteur de sa réputation. « une fissure qui n’a rien à envier aux classiques du Verdon », peut on lire. Et c’est vrai, sauf que dans le Verdon les fissures sont plus lisses, sans toutes ces concrétions si douloureuses !! Il vous faudra envisager un solide combat et des très gros friends si vous n’êtes pas habitués à ce style… De moins en moins de grimpeurs étant capable de passer ce genre d’off width, on peut se demander si c’est bien le niveau qui, ces dernières années, a évolué, ou simplement les cotations !

La voie :

Rappels dans « les dents de la mer ».

L1 : 6a, 35 mètres. Beau mur blanc avec un joli dièdre.

L2 : 5c, 15 mètres; traversée ascendante à gauche puis dièdre patiné.

L3 : 6b, 15 mètres; Traversée à droite, puis monter dans une niche faire relais sur coinceurs, dans la branche de droite de la cheminée en regardant la paroi. Un piton avant le relais.

L4 : 6a, 50 mètres; fissure cheminée en ascendance à gauche, un crux dans du rocher moyen aux deux tiers, en sortant à gauche de la cheminée. Relais sur coinceurs et grosse lunule.

L5 : 6b, 35 mètres; Fissure off width baston, rocher moyen au départ, mais facile.

Retour à pieds par le plateau.

1iere ascension : pour le bas, François Guillot et Serge Marchard en 1963. Pour le haut, Serge Gousseault et Jacques Kelle en 1969

Difficulté : TD+, 6b max et obligatoire; 140 mètres

Matériel : Friends jusqu’au 6, câblés, hexentrics, sangles, matériel grande voie équipée

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